Ce vendredi 23 mai 2025, France 5 a diffusé à 20h50 As Bestas, un thriller intense qui ne laissera personne indifférent. Réalisé par le cinéaste espagnol Rodrigo Sorogoyen, ce long-métrage porté par Marina Foïs et Denis Ménochet s’inspire d’une affaire réelle survenue en Galice, en Espagne. Une histoire où la cohabitation entre villageois et nouveaux arrivants vire au cauchemar. Faisons un Zoom sur ce drame rural devenu l’un des grands chocs cinématographiques de ces dernières années.
Une tension à couper au couteau dans un décor bucolique
Dans As Bestas, Antoine et Olga, un couple français, ont quitté la ville pour s’installer dans une ferme isolée en Galice. Amoureux de la nature, ils ont fait le choix d’une vie simple et respectueuse de l’environnement. Mais ce rêve bucolique ne fait pas l’unanimité dans le village voisin. Leur opposition à l’installation de gigantesques éoliennes sur leurs terres va déclencher une spirale de méfiance, de jalousie, puis de violence.
Les tensions montent, insidieuses, jusqu’à basculer dans l’horreur. As Bestas devient alors un huis clos à ciel ouvert, porté par une réalisation nerveuse et des performances d’acteurs magistrales. Denis Ménochet est puissant, Marina Foïs bouleversante. Le spectateur, lui, est happé, dérangé, incapable de détourner le regard.

Une histoire tristement réelle : le drame de Santoalla
Si le film dérange autant, c’est parce qu’il repose sur une tragédie bien réelle, celle du couple néerlandais Martin Verfondern et Margo Pool.
En 1997, Martin et Margo quittent Amsterdam pour s’installer dans un petit village galicien, Santoalla do Monte, déserté depuis des années. Ils restaurent une maison, plantent des arbres, vivent de manière autonome. Mais leur arrivée ne plaît pas à tout le monde. Très vite, un conflit les oppose à l’unique autre famille du hameau, les Rodríguez.
En cause : un projet d’implantation d’éoliennes. Tandis que les Rodríguez comptent sur les retombées financières, Martin refuse de céder ses terres. L’ambiance devient menaçante. Les attaques se font de plus en plus explicites. Martin dépose plainte, alerte la presse, la mairie, la garde civile. Mais en vain.
En janvier 2010, il disparaît sans laisser de trace. Il faudra attendre 2014 pour que son corps soit retrouvé dans sa voiture abandonnée en pleine forêt. Le plus jeune des frères Rodríguez, Juan Carlos, finit par avouer le meurtre. Le procès a lieu en 2016. Il est condamné à 10 ans de prison.
Rodrigo Sorogoyen : un regard sans compromis
Ce fait divers choquant, le réalisateur Rodrigo Sorogoyen en fait une œuvre viscérale. Habitué aux sujets politiques et sociaux (El Reino, Madre), il choisit ici de traiter l’intime et le collectif à la fois.
Ce n’est pas un simple thriller : As Bestas décortique le rejet de l’étranger, la montée de la violence ordinaire, le poids des rancunes rurales, les effets collatéraux des choix écologiques. Tout est filmé au plus près, presque au couteau. La caméra colle aux visages, capte les silences, les non-dits, les regards qui tuent.
Le film est dédié à Margo Pool, la veuve de Martin. Une manière de rendre hommage à une femme qui, seule contre tous, n’a jamais renoncé à faire connaître la vérité.
Une pluie de récompenses méritées
As Bestas n’a pas laissé les critiques indifférents. En France, il a reçu le César du meilleur film étranger en 2023. En Espagne, c’est un raz-de-marée : 9 Prix Goya, dont ceux du meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur (Denis Ménochet) et meilleur second rôle (Luis Zahera).
La presse spécialisée comme généraliste a salué l’intelligence du récit, la finesse de la mise en scène et l’engagement des acteurs. Certains critiques n’ont pas hésité à comparer le film à un western rural moderne, où la violence n’est pas tant physique qu’idéologique.
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Un succès discret mais réel en salles
En France, As Bestas a attiré 327 000 spectateurs. Un score modeste mais honorable pour un film exigeant. En Espagne, il dépasse le million d’entrées, preuve que le public ibérique s’est senti directement concerné par le sujet.
Le film a également tourné dans de nombreux festivals : Cannes (section Cannes Première), San Sebastián, Tokyo, Chicago… À chaque fois, il suscite les mêmes réactions : stupeur, admiration, débat.
Pourquoi regarder As Bestas ce soir ?
Il y a des films qu’on regarde, et des films qu’on ressent. As Bestas fait partie de la seconde catégorie. C’est un film qui dérange, qui questionne, qui oblige à s’interroger sur nos rapports à l’autre, à la terre, à la communauté.
Dans un monde où les tensions rurales, les conflits environnementaux et la défiance entre voisins sont plus que jamais d’actualité, ce film résonne fort. Il nous tend un miroir. Et parfois, le reflet n’est pas très flatteur.

Dernière actualité : un futur projet sur Arte
Depuis le succès de As Bestas, Rodrigo Sorogoyen ne s’est pas arrêté là. Il a coécrit une nouvelle série intitulée Los años nuevos, mêlant drame et romance. Coproduite par Arte, elle est attendue courant 2025. La chaîne franco-allemande, qui avait déjà participé à la production du film, continue donc de suivre de près le travail du réalisateur madrilène.
Plus qu’un thriller, As Bestas est une immersion dans une réalité trop souvent ignorée : celle de villages où cohabitation, modernité et traditions entrent en collision. Si vous l’avez raté ce vendredi soir, ne vous inquiétez pas, le film est disponible sur France TV sur ce lien . Alors installez-vous et laissez-vous happer par un récit aussi brutal que bouleversant.