Il y a dans l’histoire des médias des petites morts qui font plus de bruit que la fermeture d’une chaîne généraliste. La disparition annoncée de Game One appartient à cette catégorie. Créée à la fin des années 1990 et longtemps la seule antenne française entièrement consacrée aux jeux vidéo, la chaîne va cesser d’émettre d’ici la fin de l’année.
Pour beaucoup, Game One n’était pas seulement un canal de diffusion. C’était un laboratoire d’idées : émissions qui combinaient tests, débats, reportages et divertissement ; cases dédiées aux animés ; formats qui ont inspiré toute une génération de créateurs de contenu en ligne. Le visage de la chaîne, ses animateurs et leurs émissions ont largement participé à la transition culturelle qui a fait du jeu vidéo un objet populaire, partagé et commenté.
Une fermeture décidée au sommet
La décision est le fruit d’un vaste mouvement de réorganisation conduit par la maison mère. Dans le cadre d’une restructuration liée à la fusion entre Paramount et Skydance, plusieurs chaînes jugées non prioritaires vont disparaître. Game One fait partie du lot, aux côtés d’autres antennes musicales et thématiques du groupe.
Cette annonce laisse beaucoup de monde perplexe, y compris en interne. Certains salariés savaient que l’horizon était incertain : contrats courts, renouvellements précaires et impression de vivre les derniers cycles sans réelle visibilité. Les équipes, qui ont porté la chaîne pendant des décennies, se retrouvent désormais confrontées à une fin brutale, alors même que les audiences restaient solides.
Une chaîne encore rentable
Sur le plan économique, Game One n’était pas à l’agonie. Les derniers relevés d’audience indiquaient plusieurs millions de téléspectateurs mensuels au premier semestre 2025 et les résultats financiers affichaient encore des bénéfices. Ce paradoxe interroge : pourquoi fermer un média qui fonctionne ? La réponse se trouve dans la logique du groupe et ses arbitrages stratégiques à l’échelle internationale, où les chaînes jugées « non stratégiques » sont sacrifiées pour recentrer les activités sur les plateformes de streaming.
Un symbole pour la culture gaming française
La fin de Game One dépasse le simple cadre d’une grille de programmes. Pendant plus de vingt-cinq ans, la chaîne a incarné une passerelle entre télévision et culture numérique. Elle a donné une visibilité télévisuelle à l’univers vidéoludique à une époque où Internet n’était qu’à ses débuts.
Ses émissions cultes, comme Level One ( On l’adore tous Marcus ) ou TeamG1, ont façonné la mémoire collective des joueurs. Les tests en direct, les débats passionnés, les chroniques d’actualité ont nourri la curiosité et la passion d’une génération entière. Aujourd’hui, beaucoup de créateurs sur YouTube ou Twitch revendiquent cette filiation : sans Game One, le « Let’s Play » et la culture gaming grand public auraient sans doute mis plus de temps à s’imposer.
Une page qui se tourne pour les salariés et le public
Pour les salariés, c’est une période d’incertitude. Des dizaines de postes sont concernés par la fermeture. Certains espèrent encore un repreneur, d’autres se préparent à tourner la page.
Pour le public, la nouvelle sonne comme un choc. Où retrouver désormais des programmes pensés pour le jeu vidéo, les mangas et la culture geek ? Les plateformes de streaming regorgent de contenu, mais elles ne remplacent pas le sentiment communautaire et la mise en scène télévisuelle qu’offrait Game One.
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Un héritage à préserver
Game One ne disparaît pas sans laisser de traces. Son influence continue de se ressentir dans la manière dont le jeu vidéo est traité aujourd’hui par les médias. Sa fin symbolise surtout une mutation profonde : celle d’une époque où la télévision pouvait encore être un lieu d’innovation et de passion vidéoludique.
Reste à savoir si cet héritage sera préservé. Des fans plaident déjà pour la conservation des archives et certains espèrent que d’anciens visages de la chaîne perpétueront son esprit ailleurs, sous d’autres formats, sur d’autres plateformes.