La secousse était attendue depuis plusieurs semaines dans les paddocks de la Formule 1. Elle s’est produite ce mercredi matin : après deux décennies à la tête de Red Bull Racing, Christian Horner a été démis de ses fonctions avec effet immédiat. Une décision aussi brutale que symbolique, qui marque donc la fin d’une ère entamée en 2005. Pour lui succéder, l’écurie autrichienne a choisi un visage bien connu du paddock : le Français Laurent Mekies, récemment encore patron de l’équipe sœur, Racing Bulls.
Le crépuscule d’un règne de vingt ans
À 51 ans, Christian Horner quitte son poste après avoir contribué à faire de Red Bull l’une des équipes les plus redoutées de la discipline. Arrivé aux commandes alors que Red Bull débutait à peine en F1, il en a fait un empire sportif. Sous sa houlette, l’écurie a décroché huit titres mondiaux pilotes – quatre avec Sebastian Vettel entre 2010 et 2013 et quatre avec Max Verstappen entre 2021 et 2024 – et six titres constructeurs.
Mais la saison 2025 a bousculé l’équilibre établi. Les performances en net retrait de l’écurie, associées à une ambiance interne fragilisée, ont visiblement poussé la maison mère à agir. L’éviction de Horner s’inscrit dans une dynamique de recentrage : celle d’une équipe désireuse de retrouver l’excellence, même si cela doit passer par des choix drastiques.
Un contexte sportif et humain tendu
Officiellement, Red Bull a salué dans un communiqué « l’engagement et la vision de Christian Horner », tout en évoquant « la nécessité d’ouvrir un nouveau cycle ». Officieusement, plusieurs raisons expliquent cette rupture.
Sur le plan sportif, les résultats ne sont plus à la hauteur des attentes. Après douze Grands Prix disputés, Red Bull accuse un retard conséquent au championnat constructeurs. Elle n’a remporté que deux courses, là où McLaren et Mercedes semblent désormais dominer la scène. Max Verstappen, quant à lui, peine à retrouver sa domination d’antan, malgré quelques podiums.
En interne, le climat s’est dégradé. Certaines voix, y compris proches du pilote néerlandais, ont fait part d’un agacement croissant face à ce qu’ils estiment être un manque de direction claire. À cela s’ajoutent les séquelles d’une affaire de comportement inapproprié dans laquelle Horner a été impliqué en 2024. Bien qu’aucune preuve n’ait conduit à une condamnation, l’épisode a laissé des traces et terni l’image du patron.
Laurent Mekies, un profil technique et rassembleur
En choisissant Laurent Mekies, Red Bull joue la carte de la compétence, mais aussi de la stabilité. Âgé de 48 ans, l’ingénieur français bénéficie d’un parcours complet et respecté dans le monde de la F1. Diplômé de l’ESTACA et de l’université de Loughborough, il a débuté sa carrière en F3 avant de rejoindre la F1 en 2001.
Il a ensuite travaillé chez Arrows, puis chez Minardi, équipe devenue Toro Rosso, avant d’être appelé à la FIA en 2014, où il a œuvré à la direction de la sécurité et comme adjoint au directeur de course. En 2018, il rejoint Ferrari comme directeur sportif, puis comme bras droit de Mattia Binotto.
Recruté en 2023 par Red Bull pour prendre la tête de Racing Bulls, il a contribué à structurer la jeune écurie, avec une approche axée sur la rigueur technique et le management collaboratif. Sa nomination à la tête de Red Bull Racing apparaît donc comme une promotion logique et anticipée.
Alan Permane à la barre de Racing Bulls
L’arrivée de Mekies au sommet s’accompagne d’un autre changement : Alan Permane, actuel directeur de course chez Racing Bulls, lui succède à Faenza. Figure expérimentée du paddock, Permane a officié de longues années chez Renault, Lotus, puis Alpine, avant de rejoindre la galaxie Red Bull.
Connu pour sa rigueur et sa connaissance des opérations, il aura pour mission de poursuivre le développement de l’écurie sœur, tout en maintenant un lien étroit avec la maison mère.
Les défis qui attendent Mekies
Le nouveau patron de Red Bull Racing hérite d’une équipe puissante, mais fragilisée. Son premier défi sera technique : remettre la monoplace au niveau de ses concurrentes directes. La RB21, si elle demeure compétitive sur certains tracés, accuse un déficit d’efficacité aérodynamique et une instabilité sur les longs relais.
Le second défi est humain. Mekies devra rassembler une équipe dont la dynamique s’est effritée. La cohésion technique, le dialogue entre les ingénieurs et les pilotes, ainsi que la clarté dans les prises de décisions, seront des leviers cruciaux.
Enfin, reste la question Verstappen. Le triple champion du monde reste l’atout numéro un de Red Bull. Son contrat court jusqu’en 2028, mais des clauses de performance pourraient lui permettre de reconsidérer son avenir en cas de contre-performances répétées. Mekies devra donc aussi jouer les diplomates.
Un pari assumé par Red Bull
En évinçant Horner, Red Bull envoie un message clair : les résultats priment. Même les figures historiques ne sont pas à l’abri. L’arrivée de Mekies ne bouleversera pas tout du jour au lendemain, mais elle incarne un repositionnement stratégique. Plus technique, plus collectif, sans doute moins médiatique.
La suite de la saison dira si ce virage était salutaire. Mais une chose est certaine : en Formule 1, la stabilité n’est jamais acquise. Même après vingt ans de règne.
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