Si vous aimez les polars à l’anglaise, les dramas de famille qui dégénèrent et les adaptations d’Agatha Christie, il y a un rendez-vous à ne pas rater ce soir sur Canal+ avec la mini série L’Heure Zéro d’après Agatha Christie, diffusion à partir du 13 novembre 2025 en France. Adaptée du roman Towards Zero, publié en 1944, cette production britannique arrive chez nous après un passage très remarqué sur la BBC.
Canal+ en propose une version courte, pensée pour être binge watchée en une poignée de soirées: une intrigue resserrée, des décors somptueux, un casting cinq étoiles et un suspense qui joue moins sur le “qui a tué” que sur le “comment on en est arrivé là”.
De quoi parle L’Heure Zéro d’après Agatha Christie ?
Direction l’Angleterre des années 30. Nevile Strange, star britannique du tennis, vient de traverser un divorce ultra médiatisé avec son épouse Audrey, que les tabloïds ont dévorée à chaque une. Au départ, il nie avoir trompé sa femme. Puis, sous la pression et face aux preuves, il finit par admettre sa liaison avec Kay, jeune femme glamour qui devient rapidement sa nouvelle épouse.
Quelques mois plus tard, alors que le scandale commence à retomber, Nevile propose à Kay une lune de miel très particulière: passer l’été à Gull’s Point, la vaste demeure en bord de mer de sa tante, Lady Tressilian, une veuve riche et autoritaire qui mène sa maison depuis son lit. L’idée pourrait presque paraître romantique… sauf qu’il a aussi invité Audrey, son ex-femme, “pour prouver qu’ils sont restés en bons termes”.
Sur place, le duo explosif Audrey – Kay n’est pas le seul élément inflammable. Gravite autour du couple un petit groupe de personnages qui ont chacun leurs secrets et leurs frustrations:
- Lady Tressilian, la tante alitée qui juge tout le monde depuis son oreiller.
- Mr Treves, l’avocat de la famille, mémoire vivante des secrets du clan.
- Thomas Royde, ami d’enfance de Nevile, revenu d’exil avec ses propres blessures.
- Mary Aldin, la dame de compagnie surmenée, qui observe plus qu’on ne le croit.
- Un jeune invité étranger, Louis Morel, un domestique, une enfant, chacun apportant une tension ou un malaise supplémentaires.
Lorsque Lady Tressilian est retrouvée morte dans sa chambre, la question n’est pas seulement “qui l’a tuée”, mais surtout “quels vieux comptes se règlent enfin”. Tous les convives deviennent suspects, chacun avec un mobile crédible. C’est à l’inspecteur Leach, policier tourmenté par la guerre et ses propres démons, de démêler ce nœud de passions, de mensonges et de rancoeurs.
Plus qu’un simple “whodunit”
La grande particularité de L’Heure Zéro, c’est que la série prend son temps avant de commettre le crime. Le meurtre ne tombe pas dans les premières minutes: il survient seulement après que le décor psychologique est posé, que les rapports de force se sont installés, que les alliances et les jalousies se sont révélées.
On est donc moins dans un polar à énigme pure que dans une étude des comportements humains. Le spectateur voit petit à petit se dessiner ce que le roman appelle “l’heure zéro”: ce moment précis où tout ce qui a été mis en place en amont converge vers le drame.
Le scénario insiste sur:
- Le triangle amoureux Nevile – Audrey – Kay, qui fonctionne comme une bombe à retardement.
- La question du statut social, de l’argent et du pouvoir dans une famille anglaise très hiérarchisée.
- Le regard médiatique pesant sur les “people” d’avant l’heure, avec ce sportif star dont chaque faux pas est scruté par la presse.
- Les traces laissées par la Première Guerre mondiale sur l’inspecteur Leach, qui mène l’enquête en portant une blessure invisible mais omniprésente.
On sent que la production a cherché à rendre l’œuvre de Christie plus contemporaine sans trahir sa mécanique de base: mise en avant de la sexualité, dialogues plus crûs, scènes plus sensuelles que dans les adaptations “cosy” de Miss Marple ou Poirot. Cela a d’ailleurs fait polémique au Royaume Uni, certains estimant que cette Agatha Christie très adulte est la plus sulfureuse depuis longtemps.
Un casting super alléchant
Côté distribution, Canal+ a récupéré une mini série au casting vraiment séduisant, mélange de légendes du cinéma et de visages très identifiés des séries actuelles.
- Anjelica Huston incarne Lady Tressilian, la maîtresse de maison clouée au lit mais qui domine tout, à mi chemin entre ogresse de conte et grande aristocrate glaciale. Sa simple présence dans une pièce suffit à créer un malaise délicieux.
- Oliver Jackson Cohen, qu’on a déjà vu dans des séries horrifiques très populaires, joue Nevile Strange, champion de tennis à la fois charmant et inquiétant. Il manipule son entourage avec le sourire et la série s’amuse beaucoup avec son aura de golden boy fissuré.
- Ella Lily Hyland prête ses traits à Audrey, l’ex épouse: elle la rend à la fois cassée, lucide et dangereusement imprévisible, figure de femme blessée qui refuse de disparaître sagement du tableau.
- Mimi Keene, révélée au grand public par une série ado bien connue, campe Kay, la nouvelle épouse. Jeune, brillante, sûre d’elle au début, elle réalise peu à peu qu’elle n’a pas la main sur le scénario de sa propre vie.
- Matthew Rhys interprète l’inspecteur Leach, policier rongé par ses souvenirs de guerre et par un mal être qui se lit dans chaque silence. Sa performance donne au récit une dimension presque tragique.
- Clarke Peters, Jack Farthing, Anjana Vasan, Khalil Ben Gharbia ou encore Grace Doherty complètent le tableau en incarnant des personnages secondaires qui ne le sont jamais vraiment: chez Christie, même le témoin le plus discret peut dissimuler une bombe narrative.
Ce qui frappe, c’est l’alchimie entre ces comédiens. Chacun joue sur un registre légèrement différent, mais la réalisation les cadre comme des pièces sur un échiquier: sourires forcés autour d’un dîner, apartés sur la terrasse, confidences chuchotées au détour d’un couloir. La série joue clairement la carte de l’ensemble chorale, plutôt que celle du héros unique.

Une mise en scène très “british”
Derrière la caméra, on retrouve le réalisateur Sam Yates, avec un scénario signé Rachel Bennette, pour une production qui réunit plusieurs acteurs majeurs du paysage télévisuel britannique (Mammoth Screen, ITV Studios, BritBox International). La mini série a d’abord été diffusée sur la BBC au printemps 2025 avant d’être proposée en France sur Canal+.
Visuellement, L’Heure Zéro coche toutes les cases du “bon gros mystère anglais”:
- Manoir en bord de mer, isolé, battu par les vents, qui donne l’impression d’être coupé du monde et du temps.
- Côte anglaise filmée dans une lumière grise et changeante, qui fait écho à la violence des sentiments qui montent entre les personnages.
- Costumes d’époque très soignés: robes fluides, tailleurs, smoking, uniformes, tout respire le prestige et, sous la surface, l’étouffement social.
La série compte à l’origine trois épisodes d’environ une heure, mais la diffusion française fonctionne sur un format de soirée Canal+: épisode de 45 minutes environ, rediffusions et programmation complémentaire sur Polar+.
On sent parfois la différence de rythme avec certaines productions ultra modernes: L’Heure Zéro prend son temps, pose beaucoup de regards, de silences, de scènes de conversation. Pour certains, c’est un délice; pour d’autres, c’est trop lent, voire un peu froid.
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Que dit la critique ?
L’accueil critique a été plutôt partagé, ce qui est intéressant pour un objet de ce type.
Côté presse anglo saxonne, plusieurs critiques saluent une mise en scène élégante, la performance d’Anjelica Huston en matriarche terrifiante et le soin apporté à l’atmosphère. On souligne que la série ressemble à un vieux jeu de société: chaque épisode déplace les pions un peu plus près du crime.
En face, d’autres pointent:
- Un manque de “sang” dans le récit, à la fois littéralement et symboliquement.
- Un côté parfois trop appliqué, comme si la série hésitait entre le cosy mystery confortable et le thriller psychologique vraiment sombre.
Sur l’agrégateur de critiques le plus connu, la mini série se débrouille plutôt bien côté presse mais divise nettement plus le public, preuve que ce n’est pas un produit formaté pour plaire à tout le monde.
En France, les premiers avis de la presse télé soulignent:
- Une reconstitution très soignée des années 30.
- Un huis clos efficace, avec sept suspects enfermés dans un décor quasi théâtral.
- Un final jugé marquant, où la résolution n’est pas seulement un “twist” mais l’aboutissement logique de tout ce qui a fermenté avant.
Télérama, de son côté, classe la série dans la catégorie “Bof”: trop sage à son goût par rapport à d’autres propositions du moment, en particulier sur Canal+.
L’Avis de Geekette:
Si je devais situer L’Heure Zéro sur l’échelle des séries à voir absolument, je la placerais dans cette catégorie très précise: “à savourer si on aime les polars classiques, à éviter si on cherche de l’adrénaline toutes les trois minutes”.
C’est une série taillée pour:
- Les fans d’Agatha Christie qui apprécient ses intrigues à tiroirs, ses faux semblants et ses huis clos.
- Les spectateurs qui aiment les ambiances, les dialogues, les non dits autant que les révélations choc.
- Ceux qui ont envie d’un polar de qualité en quelques soirées seulement, sans s’engager sur 8 saisons.
En revanche, si vous cherchez:
- Une enquête ultra dynamique façon thriller américain.
- Beaucoup de scènes d’action ou de violence graphique.
- Une série très “bingeable” avec cliffhanger sur cliffhanger.
L’Heure Zéro risque de vous paraître un peu trop posée, voire académique.
Regarder L’Heure Zéro d’ Agatha Christie sur Canal+
